Les chrétiens arabes doivent rester dans le monde arabe
Talal Ben Abdel Aziz Al Saoud
An Nahar (Beyrouth) , 29 janvier 2002
Cet article a été écrit par le Prince Talal Ibn Abdel Aziz, membre anticonformiste de la famille royale
d’Arabie Saoudite, Etat dont la religion officielle est l’islam et qui ne tolère aucune présence symbolique
chrétienne sur son territoire.
Le monde arabe souffre actuellement d’une grave hémorragie humaine, sociale, culturelle, politique et
économique dont les conséquences risquent d’être très dangereuses. Il s’agit de l’émigration des Arabes de
confession chrétienne qui depuis de nombreuses années quittent, sans discontinuer, le monde arabe. Les
conséquences de cette émigration vont peser lourdement sur le destin du monde arabe. Si les Arabes,
musulmans et chrétiens, ne font rien pour mettre un terme à cette hémorragie, cela risque d’influer
sérieusement sur la nature de la région en terme de prospérité économique, de paix et de stabilité. Dès lors, il
convient de réfléchir aux causes d’une telle émigration qui menace le tissu social arabe.
Les Arabes chrétiens ont constitué un des pions essentiels de la construction arabe, hier comme aujourd’hui.
Au début de l’expansion islamique, ils ont joué un rôle très important sur le plan culturel, politique et militaire
dans l’Etat arabe qui s’est alors mis en place et qui s’est développé vers l’Est jusqu’en Inde et vers l’Ouest
jusqu’en Espagne. Ils ont ainsi constitué un élément dynamique qui a permis à l’islam de sortir de la Péninsule
arabique et de s’installer dans les pays du Levant.
Acteurs de l’histoire arabe
Au cours des dix-neuvième et vingtième siècles, les chrétiens arabes ont été particulièrement actifs dans la
renaissance de l’arabisme en lui donnant une dimension civilisationnelle et en l’ouvrant aux autres
civilisations qui s’étaient développées pendant la période du déclin arabe. Ils ont ainsi insufflé la modernité
dans l’arabisme. Les Arabes chrétiens, du fait de leur pluralité culturelle, étaient, et constituent toujours, un
défi permanent à la culture et à la pensée. Leur départ du monde arabe porte un sérieux coup à cette diversité.
Si nous évoquons la présence des chrétiens dans le monde arabe, c’est pour signifier que nous voulons qu’ils y
restent. En effet, leur présence est une garantie contre le développement de l’arbitraire et de l’extrémisme et
par conséquent d’une violence qui mène à des catastrophes historiques. Leur maintien dans la monde arabe est
la meilleure réponse, pas seulement en parole mais aussi en acte, aux principes israéliens de religion d’Etat, de
race pure et de peuple élu. Leur maintien dans la région est aussi une garantie du renforcement d’un Etat
moderne alliant le multiculturalisme à l’unité et constitue un obstacle au développement d’un racisme d’Etat.
Les chrétiens arabes sont un atout pour le monde arabe dans ses contacts avec l’Occident chrétien. Leur départ
de la région produit des effets négatifs qui peuvent être exploités et créer un climat défavorable au
développement du dialogue.
Le maintien des chrétiens dans le monde arabe est un choix nécessaire pour s’engager sur la voix d’une
démocratie dont les rapports au citoyen doivent se distinguer par la raison, la justice, la liberté et l’innovation.
Les chrétiens arabes enrichissent le tissu social, socle d’un Etat arabe moderne. Faire en sorte que les Arabes
de confession chrétienne puissent rester dans le monde arabe, c’est faire le choix définitif de rejeter la logique
de guerre civile telle qu’elle a pu avoir lieu au Liban en 1840, 1860 et 1975, ou telle qu’elle a lieu
actuellement au Soudan ou telle qu’elle risque d’avoir lieu en Egypte.
Enfin, encourager les Arabes chrétiens à rester chez eux permettrait de mettre un terme à l’hémorragie de
toutes les énergies créatrices du monde arabe, que ce soit dans le domaine scientifique, culturel, philosophique
ou commercial, financier et industriel.
En résumé, on peut dire que l’émigration des Arabes chrétiens de la région, si elle devait se poursuivre,
hypothéquerait sérieusement notre avenir. Nous avons donc pour mission urgente d’arrêter cette hémorragie,
de maintenir cette frange de la population arabe chez elle et même faire ce qui est en notre pouvoir pour
encourager les émigrés à revenir chez eux.
Traduit de l’arabe par Pierre Vanrie
Remarque : C’est un voeu pieux quand on connaît actuellement le sort des chrétiens en Irak !
Et aussi dans tous les pays arabes.
La Constitution islamique interdit toute conversion vers une autre religion.
Le poids de la « oumma » agit non seulement dans les pays musulmans mais aussi en France où il
y a une volonté d’islamiser la France.