Maîtres de la ville de Béziers, ils se répandirent dans les villages environnants. Les capitaines sortent de la
ville « en grand équipage » et vont assaillir Vilieneuve la Crémade, près Béziers, « portant et conduisant le
canon ». Ils tirent brèche à la muraille pour entrer dedans et meurtrir les vrais sujets du Roi, et entrèrent
dedans et saccagèrent tous les pauvres habitants et commirent beaucoup de meurtres. »
De là, ils vont porter la bonne nouvelle à Nizas ; ils mettent le feu aux portes de la ville, y pénètrent de force,
coupent « la gorge à soixante pauvres habitants » et pillent tout ce qui tombe sous leurs mains.
Servian a son tour, mais là commande Conas ; il résiste et oblige Beaudiné à lever le siège. Celui-ci se venge
en massacrant une vingtaine de soldats catholiques qu'il rencontre dans une grange auprès de Servian, en
brûlant le château de Lignan, seigneurie des évêques de Béziers, et en faisant passer au fil de l'épée
quatre-vingts hommes à Lespignan.
On nous dira que ces massacres furent les représailles des huguenots surexcités par le massacre de Vassy, que
les catholiques eurent le tort de donner un pareil exemple. Voilà encore une légende qu'il serait bon de
détruire. Bien avant l'échauffourée de Vassy, le sang des catholiques avait coulé. Le massacre de Montpellier,
qui n'a pas l'honneur de figurer encore dans nos histoires, est de 1561.
Déjà, en 1560, nous voyons les huguenots parcourir le Languedoc en armes. Le vicomte de Joyeuse écrit sur
ce sujet à Montmorency : il note en particulier que les officiers de justice de Nîmes, dévoués au Roi, avaient
dû sortir de cette ville, que depuis quinze jours, douze cents soldats armés avaient traversé le Languedoc pour
aller par pelotons à travers le Gévaudan et le Velay, du côté de Lyon (lettre du 8 septembre 1560). Trois jours
après, il écrit encore au connétable, et se déclare impuissant à maintenir l'ordre et à se faire obéir.
Dans les Cévennes, dès 1559, ceux de la nouvelle religion ont pris les armes : ils sont plus de 3.000. Villars
vient à la tête de quelques troupes y rétablir l'ordre.
A Lectoure, le 19 juin 1561, les huguenots s'arment et jettent en prison trois conseillers au Parlement de
Toulouse, avec un substitut du procureur général et un huissier venus pour informer sur un tumulte qu'ils
avaient provoqué. Dans cette même ville, ils rançonnent le chapitre.
A Montauban, comme dans toutes les villes, ils refusent d'obéir aux édits. Le 15 août 1561, ils s'assemblent et
pillent l'église de Saint-Jacques après avoir brisé les images et renversé les autels.
Une lettre de Joyeuse à Montmorency, datée da 30 octobre 1561, annonce que le Midi est déjà en état de
guerre, que les réformés en armes ont pris Lavaur, Rabastens, Réalmont, Castres, etc. Les voilà maîtres des
villes, même de Toulouse, et ils signalent leur domination par la dévastation et le massacre : les églises de
Montauban sont pillées, les religieuses de Sainte- Claire sont chassées. A Rabastens, les huguenots chassent
les Cordeliers de leur couvent, en tuent quelques- uns et pillent toutes les églises. « Je ne ferai pas long
discours, écrit de Joyeuse à la reine-mère, le 18 octobre 1561, de ce que se dispose et traite présentement à
Montpellier, Nîmes, Sommières, Sauve, Anduze, Ganges, Lunel, Castres, Laveur, Puylaurens, Mazamet,
Château-Neuf-Darri, Revel, Villefranche-de-Lauragais, Rabastens, Gaillac, Realmont, Tolose et presque
toutes les autres villes de Languedoc, représentant la ruine et désolation prochaine de tout ce pais de
Languedoc si, par la grâce de Dien et votre Providence, ledit pais n'est secouru. »
Ces quelques lignes étaient nécessaires pour détruire la légende qui s'est créée autour du massacre de Vassy.
ien avant cette date, le sang des prêtres et des catholiques avait coulé en Languedoc, la province protestante
par excellence. Le massacre des catholiques de Montpellier est d'octobre 1561, six mois avant celui de
Vassy.