Vous serez comme Dieu
Le serpent dit à la femme : « Non, vous ne mourrez point ; mais Dieu sait que le jour où vous en mangerez, vos yeux s'ouvriront et vous serez comme Dieu, connaissant le bien et le mal » (Genèse chap. III, 4-5)
I- LE PLUS VIEUX ET LE PLUS GRAVE PECHE
C'est le péché de nos premiers parents qui, trompés par le serpent, crurent pouvoir, dans la désobéissance, devenir comme Dieu.
Avant eux, les anges révoltés avaient péché de la même manière. Isaïe, parlant de Lucifer précise : « Son c ur s'est élevé. Il a dit « Je suis Dieu ». Il a pris son vouloir pour la volonté de Dieu. On sait aussi qu'à la clameur de ces anges révoltés : « Nous sommes comme Dieu », saint Michel et les anges fidèles ont répliqué « Qui est comme Dieu ? »
Il faut comprendre que ce péché d'orgueil de l'esprit est le plus grave péché que l'on puisse concevoir et la cause principale de la perdition des créatures. Comment celui qui a tout créé par amour pourrait-il supporter la révolte des êtres qui lui doivent la vie ? (I).
Il est écrit dans le livre de la Sagesse : « Car Dieu a créé l'homme pour l'immortalité et l'a fait à l'image de sa propre nature ; c'est par l'envie du diable que la mort est entrée dans le monde ; ils en feront l'expérience ceux qui ont choisi le parti du démon » (Sagesse II 23-24).
Il existe un parti du démon et nous pouvons quotidiennement observer son action dans le monde. Son nom est Révolution (Etym. d'après Littré : du latin revolutio, de revolutus, retourné). La Révolution s'est retournée contre Dieu comme le serpent se retourne contre la créature pour la piquer.
II- LES OBJECTIFS DE LA REVOLUTION
Ce sont ceux de son fondateur et de son inspirateur, Satan, prince de ce monde qui, malgré sa déchéance, a gardé la puissance et l'intelligence d'un archange (2). C'est pourquoi, si l'on veut comprendre les objectifs de la Révolution, il faut connaître les traits essentiels de Satan.
a)Satan (3)
Les Ecritures n'enseignent pas comment il est devenu mauvais. Il y eut sans doute pour les anges une épreuve comparable à celle des hommes et certains d'entre eux y succombèrent. D'après saint Thomas, les anges auraient connu comme les hommes une vie naturelle et une vie surnaturelle.
« Le démon a désiré être semblable à Dieu, en désirant comme fin dernière de béatitude ce à quoi il pouvait parvenir par sa nature même, en détournant son désir de la béatitude surnaturelle » (4).
Le cardinal Pie, un des plus grands esprits du 19e siècle, exprime la même pensée ; mais il croit que Satan se révolta quand Dieu lui fit connaître que le Verbe allait s'incarner dans un homme. Le cardinal Pie écrit :
« Satan se jugeant blessé dans la dignité de sa condition native (5), se retrancha dans le droit et dans l'exigence de l'ordre naturel. Il ne voulut, ni adorer dans un homme la majesté divine, ni accueillir en lui-même un surplus de splendeur et de félicité dérivant cette humanité déifiée. Au mystère de l'Incarnation, il objecta la Création. A l'acte libre de Dieu, il opposa un droit personnel. Enfin, contre l'étendard de la grâce, il leva le drapeau de la nature.
Les traits principaux de Satan sont les suivants :
1)SATAN EST UN ORGUEILLEUX
Or l'orgueil est le principe de tout péché, si bien que l'orgueilleux devient lui-même, à son tour, principe de l'abomination.
2)SATAN EST UN MENTEUR
Le diable, a dit Jésus, « est menteur et père du mensonge ».
Mentir, c'est substituer sa version des choses à la réalité ; c'est faire violence au vrai ; c'est parodier la création
; c'est faire la guerre à Dieu qui s'est dit lui-même lumière et vérité.
Alors que le Christ est le témoin fidèle et véritable, principe de la Création selon Dieu, Satan est « le faux témoin, le traître semeur de doute et menteur, principe de la contre-création » (Apocalypse).
3)SATAN EST UN CONTREFACTEUR
Son royaume est une contrefaçon du royaume céleste. Peut-être espère-t-il ainsi tromper plus facilement ceux qui ne sont pas fermement attachés à la vérité. Il est possible aussi que, dans son envie et dans son impuissance d'égaler Dieu, il le singe. D'où cette expression qu'on lui a donnée parfois de « singe de Dieu ».
4)SATAN EST UN MEURTRIER
Il cherche à tuer l'âme et ainsi à la priver de la vie éternelle. Saint Thomas écrit : « Le diable avait déjà péché. Voyant que l'homme avait été constitué de manière à pouvoir parvenir à la félicité éternelle dont lui-même était déchu, le diable s'efforça de détourner l'homme de la voie droite de la justice ».
5)SATAN A UNE PUISSANCE LIMITEE ET UNE SCIENCE LIMITEE
Car il n'est lui-même qu'une créature. Il ne peut aller au-delà des limites fixées par Dieu.
Il ne peut pas nous perdre sans nous. Il nous tente, il cherche à nous tromper, mais il n'y parvient qu'avec notre consentement. Il faut que nous ayons repoussé la grâce de Dieu et que nous acceptions de l'écouter et de lui obéir parce que ce grand séducteur n'est pas maître de notre volonté.
De grands mystiques ont affirmé que ce sont les péchés des hommes qui augmentent la puissance de Satan sur l'Humanité car celui-ci est aussi un instrument de la justice de Dieu (Attila était le fléau de Dieu. Le communisme, de nos jours, qui progresse partout, constitue pour le monde un fléau encore plus redoutable).
La science de Satan surpasse la science humaine, mais il ne connaît pas l'avenir qui appartient à Dieu. Il n'ignore pas les prophéties ; mais la prophétie présente un côté obscur et, « enflé d'orgueil », il a souvent une fausse optique qui ne lui permet pas de bien l'interpréter.
b)Les traits de Satan se retrouvent dans la Révolution
La Révolution, contrefaçon de la religion catholique, est une forme de religion d'où Dieu est exclu.
André Malraux a écrit : « La Révolution joue aujourd'hui le rôle que joua la vie éternelle ».
Et Jean Cau (6) précise : « La force et le crédit du socialisme viennent de ce qu'il hérite de l'utopie religieuse et Dieu se mourant, qu'il prétend réaliser sur terre le royaume de Dieu. Le socialisme est purement et simplement un détournement du sacré ».
La Révolution n'est pas seulement un système social et économique. Elle est avant tout une mystique humaine, une autre foi.
Foi en un homme nouveau, capable de créer un monde meilleur, qui conduira l'humanité vers des
« lendemains qui chantent ». Volonté prométhéenne de réaliser, ici-bas, le bonheur en se passant de Dieu, par les seuls moyens naturels. La Révolution est un messianisme d'ordre temporel.
En lisant dans Paris-Match (n° 2533-12 nov 1982), l'interview donnée par Paul Thorez au moment de la sortie de son livre (7), j'ai relevé les phrases suivantes fort intéressantes quand on sait que ce garçon à été élevé en Russie avec les autres enfants du sérail communiste, mais qu'il a eu le courage de quitter le parti :
« Quitter le parti, c'est comme sortir de religion parce que c'est une religion. Sans Dieu, mais avec sa liturgie : les meetings, les réunions de cellule, les rapports... C'est comme la messe (8), c'est une communion au sens
religieux du terme. En URSS, c'est ritualisé au maximum. Les congrès du parti ne sont pas les congrès où l'on discute politique, réformes. Pas du tout, c'est un culte que l'on célèbre. Avec la momie de Lénine qu'on adore... On n'arrive toujours pas à expliquer et on se trouve devant le P.C. comme devant le succès de la secte Moon. Pourquoi ? Pourquoi dans un pays démocratique comme la France y a-t-il encore des millions de gens fascinés par le Communisme ? ».
La réponse à ces questions, pour nous catholiques traditionalistes, est simple. Elle nous a été donnée par saint Paul, à propos du système d'iniquité, lorsqu'il s'adressait aux Thessaloniciens : « Parce qu'ils n'ont pas ouvert leur c ur à l'amour de la vérité qui les eût sauvés, Dieu leur envoie des illusions puissantes qui les feront croire au mensonge, en sorte qu'ils tombent sous son jugement tous ceux qui ont refusé leur foi à la vérité, et ont au contraire pris plaisir à l'injustice » (2° épit. aux Thess. ch II, 10-12).